Atelier 8 : Écosse / Études écossaises
SFEE (Société Française d’Études Écossaises)
Responsables de l’atelier
Céline Sabiron
Université de Lorraine
celine.sabiron@univ-lorraine.fr
Philippe Laplace
Université de Franche-Comté
philippe.laplace@univ-fcomte.fr
Leila Cheurfa
Université de Paris 1 Panthéon-Sorbonne
Leila.Cheurfa@univ-paris1.fr
« De la création au dépassement de frontières sociales : Les relations de crédit au prisme du contentieux judiciaire dans le nord de l’Ecosse au XVIIIe siècle »
Les échanges sociaux et économiques de l’Ecosse du XVIIIe siècle ne reposent pas principalement sur le transfert de monnaie métallique mais sur l’établissement de contrats de prêt entre particuliers. La mise en place de crédit est nécessaire autant dans les villes que dans les communautés villageoises afin de pouvoir vivre en société. Or, ces obligations financières créent une frontière sociale nette entre les individus car elles attribuent désormais les statuts d’endetté et de créancier à des agents qui jusqu’alors avaient un rang égal l’un vis-à-vis de l’autre. Le contrat juridique crée une séparation induisant une relation à la fois de pouvoir et de dépendance. Il s’agit d’une frontière sociale qui ne peut être gommée qu’avec le remboursement de la dette.
En cas de défaut de paiement, le créancier peut dès lors exercer une contrainte par corps sur son débiteur. Dès lors de nombreuses procédures judiciaires propres au système légal écossais se mettent en place, engageant notamment le déplacement de documents juridiques entre les agents et entre les différentes institutions judiciaires. Les individus eux-mêmes se déplacent comme c’est le cas par exemple du messenger qui doit à la fois délivrer des lettres légales provenant d’Edimbourg en main propre à l’endetté et l’emprisonner si ce dernier ne se soumet pas à leurs décisions. Pour tenter d’échapper à la prison, l’endetté peut alors avoir tendance à se réfugier dans les confins de l’Ecosse. Ces mouvements peuvent parfois conduire à une sortie définitive de la communauté locale par la traversée de la mer du Nord vers les îles Shetland. Se pose alors la question des frontières intérieures de l’Ecosse, les archipels du nord formant une frontière naturelle d’isolement par l’insularité et le manque d’accès qui en résulte.
Une fois incarcéré, une frontière qui apparaît comme désormais hermétique et fermée se forme. L’enfermement est un confinement, car cela dresse un véritable mur physique entre l’endetté et les autres membres de la communauté. Existe-t-il des barrières sociales à l’intérieur de la prison, que ce soit entre les différents types de prisonniers ou entre les hommes et les femmes ? Une problématique se pose alors : comment rembourser sa dette sans avoir accès à ses affaires et relations économiques de l’autre côté des barreaux de la prison ? Bien que la prison ait été conçue comme une frontière fermée, elle demeure en réalité poreuse et permet l’accès à un certain lien social. En effet, les personnes endettées emprisonnées ont la possibilité de créer un dépassement de la frontière en utilisant divers moyens stratégiques (pétitions, liens familiaux, maladie, cession de biens, négociations…) qu’il est intéressant d’étudier.
Biographie
Leila CHEURFA est actuellement en seconde année de doctorat en histoire à l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne sous la direction de Madame Anne Conchon. Elle appartient à l’Unité mixte de recherche (UMR 8533) de l’IDHE.S (Institutions et dynamiques historiques de l’économie et de la société). Sa thèse s’intitule : « Crédit et contentieux judiciaires. L’emprisonnement pour dette dans le nord de l’Ecosse au XVIIIe siècle ».
Christian Civardi
Université de Strasbourg
civardi.christian@orange.fr
« Du norrois au shetlandais : le déplacement de la frontière linguistique scoto-scandinave, IXe–XXIe siècles »
Dans les Iles du Nord (Orcades et Shetland), la langue des envahisseurs vikings du IXème siècle, le norrois, a perduré, sous la forme du Norn, pendant près d’un millénaire. Sous les assauts successifs de l’immigration écossaise scotophone (à partir du XIVe siècle), du transfert de souveraineté du Danemark-Norvège à l’Ecosse (XVe siècle), de l’implantation de l’Eglise d’Ecosse (XVIe siècle) et du remplacement du droit norvégien par l’écossais (XVIIe siècle), puis du traité d’Union parlementaire de 1707, le rapport de bipolarité Norn-norvégien évolue en une diglossie (selon une majorité d’auteurs) ou, selon d’autres, une créolisation Norn–Scots. Le premier finit par céder la place au second au début du XVIIIe siècle aux Orcades, du XIXe aux Shetland. S’il a hérité d’un fort substrat Norn, le Shetlandic n’en est pas moins une variété de Scots, et non de scandinave. Toujours vigoureux, le Shetlandic est parlé par la moitié de la population de l’archipel.
Abstract : A Scandinavian language was spoken in the Northern Isles (Orkney and Shetland) for almost a thousand years : Norse, the language of the ninth-century Viking settlers, which gradually turned into Norn. A primarily oral language, Norn was eroded by an influx of Scottish immigrants (from the XIVth century onward), the transfer of sovereignty from Denmark-Norway to the Scottish crown (XVth century), the expansion of the Kirk (XVIth century), the replacement of Udal-law by Scots Law (XVIIth century) and the 1707 Treaty of Union. As a result of these successive onslaughts, the Norn-Norwegian bipolarism turned into a Norn-Scots relation of diglossia (according to a majority of scholars) or creolisation (argue some others), and Norn eventually gave way to Scots in the early XVIIIth century in Orkney, in the early XIXth in Shetland. In spite of its obvious Norse flavour and heritage, Shetlandic is definitely a variety of Scots, still spoken by half the population of the archipelago, and still going strong.
Biographie
Christian CIVARDI is Professor emeritus of British studies at the University of Strasbourg. A founding member of the Société Française d’Etudes Ecossaises, he has published widely on Scottish history, society and culture, notably Le Mouvement ouvrier écossais, 1900-1931 (1997), L’Ecosse depuis 1528 (1998), L’Ecosse contemporaine (2002) and translated William McIlvanney’s novel Docherty into French.
Daphné Cousin-Martin
Université de Rouen Normandie
daphne.c-m@laposte.net
« Le brouillage des frontières dans le Tartan Noir : une approche sensible de la langue au croisement de la traductologie et des Translation Studies »
L’Ecosse partage une frontière avec l’Angleterre, voisin avec qui l’évolution des relations a transformé et influencé le paysage politique et littéraire local écossais. Marqué par des spécificités liées à son genre littéraire et à l’histoire de son territoire national, le Tartan Noir pose le défi de la navigation entre Scottish English et Scots, et entre vulgarité et poétique. Cette dernière dualité stylistique à valeur culturelle fait écho à la quasi-dualité de l’anglais (ou l’écossais standard si l’on tient compte de la langue utilisée dans les audiobooks) et Scots. Ces deux dualités participent à la texture du Tartan Noir.
L’exploration des traductions publiées françaises révèle des sensibilités variables à ces facettes essentielles, une ambivalence que nous retrouvons dans les productions de Google et DeepL. Ainsi, nous constatons fréquemment une perte totale voire partielle de ces éléments.
Nous écartant des oppositions binaires traditionnelles en traduction, nous dégageons des stratégies pour les préserver lors du passage au français.
Afin de délimiter le spectre de notre présentation, nous mettrons principalement en saillance les romans de Chris Brookmyre, dont le style floute les frontières établies, en faisant référence aux notions de langue, voix, accent, registre, rythme, sens et émotions. Alliant la théorie (Chuquet et Paillard, 2002 ; Meschonnic, 1999 ; Cadera et Pintarić, 2014) à la pratique, nous comparerons nos traductions aux traductions publiées et à celles produites par Google et DeepL.
Biographie
Daphné Cousin-Martin est en quatrième année de doctorat au sein du laboratoire de l’ERIAC, à l’université de Rouen Normandie. Sa thèse s’intitule « Traduire l’ouïe et le toucher dans le Τartan Noir : théories, pratiques, et nouvelles technologies ». Sa recherche porte sur l’oralité, l’agentivité, les associations entre modalités ainsi que sur la traduction automatique neuronale. Elle enseigne actuellement à l’université de Caen Normandie en tant qu’ATER au département d’études anglophones.
Lara Cuny
Université de Aix-Marseille
lara.CUNY@univ-amu.fr
“Cultural boundaries within the Arts Council of Great Britain: the cases of Scotland and Wales”
The Arts Council of Great Britain (ACGB) was created in 1940 under the name of the Council for the Encouragement of Music and the Arts (CEMA). As early as 1942, a Scottish Committee was set up within CEMA, and a Scottish representative appointed by the Scottish Office was added to the Council. With the 1946 Royal Charter, CEMA became the ACGB, but the Scottish appointee and Committee remained, thus ensuring the proper representation of Scotland. That same year, Wales was given the same status with the creation of the Welsh Committee, but this was rather due to equal treatment with Scotland rather than a demand from the Welsh. Over the years, both committees gained autonomy, first in 1967 when they officially became the Scottish and the Welsh Arts Councils, and finally in 1998 when the ACGB was dismantled and three separate Arts Councils were set up: one for Scotland, one for Wales and one for England.
The division of the ACGB into different committees begs the question of boundaries between the nations within Great Britain. What differences existed between the policies and measures implemented in Scotland, Wales and England? How did the Scottish and Welsh Committees try to cater for their own territories, keeping in mind the cultural specificities of their communities?
In both Wales and Scotland, the objective was not to cut themselves off from the rest of Great Britain. Cultural exchanges were valued as a way to provide examples and inspiration in order to raise the standards of their own art works. In the 1950s, the creation of national institutions, such as the Scottish National Orchestra and the Welsh National Opera, was also key elements to their policy. While Wales decided to use that organisation to favour the creation of Welsh works of art (by local author, derived from the tradition of Welsh choral singing, sometimes even in the Welsh language), Scotland adopted a more metropolitan approach, attracting musicians and conductors from other countries and mostly performing non-Scottish works. Nevertheless, as the Orchestra provided an outlet for highly-qualified Scottish musicians and performed all over the nation, it still boosted the practice and enjoyment of music.
In the 1950s and 1960s, the Scottish and Welsh Committees thus implemented a mixed policy. Their autonomy from the rest of the ACGB allowed them to support and promote national companies which would have otherwise been swamped by the large number of English arts organisations. Yet this boundary was meant to protect Scottish and Welsh arts without blocking out the influx of foreign ideas, practices, works and artists, especially if they came from overseas. This comparative study of Scotland and Wales will shed light on the state-sponsored development of Scottish and Welsh cultures in the second half of the 20th century.
Biographie
Lara Cuny est Professeure Agrégée détachée dans l’enseignement supérieur (PRAG) au sein de l’Université d’Aix-Marseille. Elle est également Docteure en Etudes du Monde Anglophone et est spécialisée en civilisation britannique et en études irlandaises. Son travail porte sur les politiques culturelles au sein des îles britanniques, et plus particulièrement sur l’étude du modèle de l’Arts Council et de son principe d’autonomie (arm’s length principle en anglais), ainsi que sur l’analyse de la place des arts et de la culture durant le conflit nord-irlandais. Elle est l’auteure de l’ouvrage The Arts Council of Northern Ireland (1943-2016) publié en 2022 aux éditions Palgrave Macmillan. Ses recherches actuelles se portent sur l’Ecosse et le Pays de Galles, et le lien entre politique culturelle et nationalisme. Elle est membre du Laboratoire d’Etudes et de Recherche sur le Monde Anglophone (LERMA).
Emlyn David
Université Bordeaux Montaigne
emlyn.david@u-bordeaux-montaigne.fr
“Unstable boundaries: Representing the Anglo-Scottish border in Hogg’s The Three Perils of Man (1822)”
Set during the reign of Robert II (1371-1390), The Three Perils of Man opens on the confrontation of an English and a Scottish family over Roxburgh castle, the object of a long-standing dispute between England and Scotland about the border. The novel presents the area as a place of both conflict and exchange. Through its setting and its plot, it offers a reflection on Scotland’s past and on its cultural heritage at a time when the political significance of the Anglo-Scottish border has changed. Hogg celebrates the area as having a cultural identity of its own, since the whole novel is steeped in Border tradition and folklore, but it is a place where all kinds of limits are porous, unstable and subject to change. Political allegiances shift, ladies cross-dress as pages, and the oral tradition of the Border merges with Hogg’s literary endeavour. Social hierarchies are overturned, gender boundaries are parodied, literary categories are constantly redefined in the novel. In the same way that the Anglo-Scottish border is located at the crossroads of two communicating spaces, political, social, gender and literary boundaries are overstepped. Characters, text and author thus resist categorisation. On the literary level, the novel integrates elements of historical fiction, romance and the Gothic while drawing on a rich Border background of oral poetry and story. Because of its loose historical background, its internal complexity and its composite nature, The Three Perils of Man has been deemed “extravagant” or “trivial” by contemporary reviews. This paper argues that it represents a turning point in Hogg’s fashioning of an aesthetic of his own. It examines the way in which such an emblematic space as the Border becomes the privileged stage for all kinds of transgression. It describes the way in which the representation of the region and the references to Border tradition in the novel destabilise all forms of boundaries in the literary text to promote the overstepping of limits and the celebration of hybridity.
Biographie
Emlyn David is a first-year English Literature PhD student at the University of Bordeaux-Montaigne. In 2022, she wrote her dissertation “Scènes de récit et poétique de l’écoute dans l’œuvre de John Clare”, about the forms and functions of storytelling in the poetry of John Clare. Her PhD research focuses on the representation of folklore and popular culture in nineteenth-century Scottish literature, more specifically in the works of James Hogg, George MacDonald and R.L. Stevenson. Other research interests include Romantic poetry, labouring-class poetry, Scottish literature and the representation of oral storytelling in the works of authors of the eighteenth and nineteenth centuries.
Blaise Douglas
Université de Rouen Normandie
Blaise.Douglas@Wanadoo.fr
« Les frontières intérieures dans Kidnapped de R. L. Stevenson »
Dans le roman de Stevenson, les frontières sont omniprésentes. Physiques, d’abord, puisque la géographie impose au jeune narrateur sa rigueur et ses contingences, lorsqu’il découvre les difficultés qui se présentent au voyageur dans un pays dominé par l’eau et les montagnes. À ces frontières naturelles, s’ajoutent celles, humaines cette fois-ci, de la culture propre à un pays inconnu. David Balfour ne se voit pas seulement confronté à la barrière linguistique que représente pour lui la langue gaélique, mais doit encore faire face à des oppositions politiques, religieuses et morales, qui heurtent ses convictions profondes.
Ce n’est que progressivement que le protagoniste de cette aventure va découvrir que ces frontières ne lui sont pas extérieures, mais lui sont au contraire intimement liées. Si lors de son premier contact avec les Hautes Terres d’Écosse, il ne parvient pas à franchir un simple bras de mer disparaissant à marée basse, il parvient, contraint par les circonstances qui le pressent, à sauter une cascade furieuse et bien plus redoutable. Obstacles physiques et limites intérieures finissent ainsi par se confondre, ouvrant la perspective d’une progression aussi bien spatiale que personnelle.
Si les oppositions culturelles ne s’annulent pas, elles semblent elles aussi perdre de leur importance du fait de la cohabitation que met en scène l’amitié unissant David Balfour à son compagnon d’infortune, Alan Breck. La fameuse Highland Line qu’évoque ce dernier au moment de son franchissement apparaît ainsi de moins en moins pertinente et le lecteur est invité à partager la découverte que fait le narrateur de cette unité dans la diversité. Le Lowlander se rend ainsi compte qu’il a plus en commun avec son ami Highlander, qu’avec ce qui lui reste de sa propre famille, son oncle l’ayant fait kidnapper afin de s’en débarrasser et de continuer à jouir de son héritage.
La frontière qui semblait s’interposer entre lui et l’univers des Highlands dans lequel il s’est trouvé immergé par la force des choses, paraît ainsi s’effacer car elle s’avère en réalité l’expression de deux facettes d’une même entité, l’Écosse. L’ambiguïté devient ambivalence, la faiblesse supposée d’un pays divisé se mue en une force qui transcende les oppositions et David Balfour en devient intimement conscient lorsqu’il confie à ses lecteurs l’origine gaélique de son patronyme, incarnant ainsi lui-même cette unité nationale que le soulèvement jacobite de 1745 a fait brièvement voler en éclats.
Biographie
Blaise Douglas enseigne actuellement la littérature à l’Université de Rouen-Normandie. Après une thèse portant sur des prophéties anglo-écossaises du XIVème siècle, il s’est intéressé aux grands textes de la fin du Moyen-Âge, tant en Angleterre qu’en Écosse. Plus récemment, ses recherches l’ont amené à étudier la musique écossaise et son contexte historique, littéraire et social.
Jérémy Elmerich
Université Polytechnique des Hauts de France-université du Québec, Montréal
kg391078@ens.uqam.ca
« Le nationalisme en discours : entre clôture sociale et frontière politique »
Il y a désormais près de dix ans que s’est tenu le référendum d’autodétermination écossais. Loin d’échapper à l’attention des chercheurs, cet évènement sans pareil laissait apparaître un débat où les enjeux économiques semblaient dominer les questions identitaires [1]. Néanmoins, sous les apparences, les discours évoquant l’identité écossaise ou britannique, comme rappels en forme de préambule ou comme arguments au long cours n’étaient pas non plus absents. Ici et là, l’identité et les valeurs qui lui sont associées – fondant les intérêts à poursuivre – servaient au renfort du propos, décrivant à l’occasion faux et vrais Écossais ou Britanniques, traçant les limites de l’appartenance.
Dans un contexte particulièrement sensible, les acteurs marchaient sur des œufs, car tenter de faire émerger et primer le Nous est souvent sujet à caution. De tels discours, au sein d’un État vieux de plus de trois siècles où les identités ont cessé d’être meurtrières [2], présentent des risques nombreux, dont celui de discréditer la cause toute entière. Pour autant, c’est aussi du sentiment de cette identité que dérive le choix politique qui s’impose. D’où la nécessité de dessiner les contours de cet être-ensemble national, par la voie dialectique de la différence et de la référence.
Ainsi, les hypothèses les plus évidentes à ce chapitre conduisent à considérer que les tenants du Oui plaident en faveur d’une identité écossaise relativement établie, se distinguant fermement de l’identité britannique. À l’opposé, on peut aisément concevoir que les tenants de l’union adoptent une position opposée, visant à souligner la valeur de la britannicité, au-devant même de la scotticité, ou à réitérer la compatibilité fondamentale de ces deux identités.
À travers la communication proposée, reposant sur l’analyse de discours compris entre l’élection du SNP en 2011 et la tenue du référendum du 18 septembre 2014, nous visons à faire émerger l’éventail des positions adoptées par les protagonistes des deux camps. Nous questionnons ainsi la nature des identités mises en exergue, la portée donnée au concept de nation comme « communauté politique imaginée » [3] par les acteurs. Cette analyse de discours sera inscrite dans l’horizon plus large des référendums d’autodétermination tenus au Québec en 1980 et en 1995, afin de décrire la trajectoire poursuivie par le nationalisme depuis la seconde moitié du XXe siècle.
Biographie
Jérémy Elmerich est doctorant en Civilisation britannique à l’Université Polytechnique des Hauts-de-France et en Science politique à l’Université du Québec à Montréal. Ses travaux portent sur le nationalisme, les vies politiques britannique et canadienne, la sociologie historique et de l’identité. Il soutiendra sa thèse intitulée « Des imaginaires rivaux : Nationalismes britanniques et écossais, canadiens et québécois » le 18 décembre 2023. Ladite thèse propose une sociologie historique du nationalisme dans laquelle s’insère une analyse des discours tenus à l’occasion des trois référendums d’autodétermination de 1980 et 1995 (au Québec) et de 2014.
[3] Benedict Anderson, Imagined Communities. Reflections on the Origin and Spread of Nationalism, Londres, Verso, [1983] 1991, p. 9.
Clément Guézais
Université de Caen Normandie
clement.guezais@unicaen.fr
“A country begins with a ground: remarks on Scotland’s long distance walking routes”
In 1890, Scottish famous mountaineer Hugh Munro declared that while Scotland may have been despised for its wild and mountainous nature, it was precisely for these reasons that it was now worthy of being explored and celebrated in the same way as the Alps. The following year, another Scotsman, Peter Hume Brown, compiled all the earliest known accounts of travels in Scotland that he had been able to gather. If Scotland had been confined until the end of the 17th century to the status of terra incognita, he declared, these accounts allowed the modern reader to touch what no historian could ever hope to achieve: a particular intensity where the national character lies, in the land itself. In little more than a century, Scotland’s status as a popular destination for mountaineers and walkers has not wavered.
Starting in the 1980s, this thirst for discovery also involved the development of long-distance routes. These trails stretch beyond the mountains, marking the legacy of cultural figures or remarkable Scottish personalities. They also put the forms and features of the Scottish territory on the forefront, unwinding along borders and coastlines. The political dimension of this development was made clear in 2012, when the Scottish First Minister Alex Salmond inaugurated the Scottish National Trail: this route runs across the whole length of a country that the pro-independence leader was determined to put back on the map.
This presentation will be an opportunity to look at the rediscovery of Scotland, and at the political importance of a network of ways and lines aimed at measuring and celebrating a country in its most tangible reality.
Biographie
Clément Guézais holds a PhD in British civilisation and in Scottish Medieval History. His works focus on the relations between France and Scotland since the Middle Ages, especially in the fields of cultural history. They cover topics such as friendship and otherness, space and movement, as well as the process of identity-making and national self-definition.
Klaudia Kopiasz
Université de Aix-Marseille
klaudia.KOPIASZ@univ-amu.fr
“The Crisscrossing of Literature and Medicine : The Depiction of Alzheimer’s Disease in Jackie Kay’s Poems and Short Stories”
In the 2017 Interview with Louise Rhind-Tutt, Jackie Kay, the contemporary Scots Makar, shared her thoughts concerning the situation in her country: « we are living in a particular world where we are forgetting things. More and more people are experiencing Alzheimer’s and dementia in their family. (…) Also, I think people have been so distressed by some of the recent political events that they are losing concentration. (…) But the idea of what we remember and what we forget is timeless.”
It is worth observing that Kay’s interest in the relationship between memory and oblivion becomes a means to express her concern about the sociopolitical and medical issues. Indeed, the author often invites the crisscrossing of different disciplines in both her literary works and public speeches. Through their exploration of Alzheimer’s disease, some of her poems, such as Where Are My Keys, and short stories entitled Mind Away and These Are Not My Clothes illustrate the complex intersection of literature, politics and medicine.
Bearing in mind the context of the war of the two cultures, it was once believed that science and arts represented two separate and incompatible disciplines. Yet, following the emergence of the medical humanities by the end of the 20th century in the US and later Great Britain, a dialogue between the two fields of study was eventually established. Consequently, Kay’s poems and short stories on Alzheimer’s disease represent a rich space of creativity in a way they explore, discuss, problematise and even attempt to embrace the illness which, for a long period of time, has exclusively been interpreted and analysed by doctors and scientists in the medical discourse.
Jackie Kay breaks the boundary between literature and medicine in order to show that the former is not only complementary but – more importantly – necessary to the medical discourse on Alzheimer’s disease and dementia. Drawing from literary analysis, politics and medical humanities, this presentation will explore the ways in which the former Scots Makar represents and problematises the illness to create, within her space of writing, the intricate contact zones where both literature and medicine can meet.
Biographie
Klaudia Kopiasz is a second-year Ph.D. Student at Aix-Marseilles University working on identity, memory and Alzheimer’s disease in British literature. After having received her MA degree with acclaim, she decided to pursue her reseach on the key notions of her thesis, such as self, memory, oblivion and illness, in order to study the way in which literature can invite other discourses, e.g., the medical one. Apart from doing research being part of her doctoral studies, Klaudia Kopiasz also lectures English Literature and English for non-specialists.
Philippe Laplace
Université de Franche-Comté
philippe.laplace@univ-fcomte.fr
“‘St Kilda No More’: the 1930 evacuation in history and fiction”
The 1930 evacuation of the archipelago of St Kilda marked the end of an extraordinary island community that had survived in extreme conditions for millennia. On August 29th, 1930, the last 36 inhabitants of the archipelago abandoned the island of Hirta aboard HMS Harebell, never to return, apart from short periods. They crossed the sea of the Hebrides towards Lochaline and Oban where they settled. The archipelago was subsequently purchased by the Marquess of Bute, who transformed it into a natural sanctuary for birds.
This paper will delve into the motivations behind the islanders’ decision to abandon their island and their life on Hirta. While external factors, such as the influence of the nurse Willamina Barclay or the impact of tourism have often been cited, we will explore the internal pressures that also contributed to their decision. Andrew Fleming’s statement that their decision was a matter of “destiny” rather than a pressure due to external forces will be discussed. Additionally, we will also study how the British government organised the evacuation as well as the handling of the proceedings by the officials present on St Kilda, including Tom Johnson, who was there on behalf of the Secretary of State for Scotland. We will also analyse the paradoxical media and public reactions to the islanders’ arrival on the mainland. Finally, we will explore the fictionalized accounts of the evacuation, including the novels L’adieu à Saint-Kilda (2018) by Éric Bulliard, The Lost Lights of St Kilda (2020) by Elizabeth Gifford, and Karen Swan’s The Last Summer (2022), as well as the film Ill Fares the Land (1982) by Bill Bryden. We will see how these fictional accounts shed some light on the fate of the St Kildans on the mainland.
Biographie
Philippe Laplace est maître de conférences HDR à l’université de Franche-Comté, Besançon. Il est l’auteur d’une monographie sur Neil Gunn et d’une sur St Kilda. Il a dirigé ou codirigé six ouvrages et dirige la série « Caledonia : Regards sur l’Écosse » aux Annales littéraire des PUFC.
Fanette Pradon
Université de Grenoble Alpes
fanettepradon@orange.fr
« Les lieux de divertissement à Glasgow entre 1860 et 1900 : des marqueurs des frontières sociales et culturelles »
Les lieux de divertissement à Glasgow durant la seconde moitié du XIXe siècle sont un territoire privilégié pour s’interroger sur les notions de frontière et de déplacement. Ils apparaissent plus communément sous la forme de réseaux –penny theatres, dancing halls, opéras…–, dont le développement rapide est encouragé par la croissance économique de la ville et la réorganisation du temps de travail des classes ouvrières. Ils témoignent, dans un premier temps, de la division sociale et culturelle existante entre la bourgeoisie et les classes populaires, composées d’hommes et de femmes issues d’horizons, voire même de pays différents, et venus en masse s’établir à Glasgow dans les années 1850, à la recherche d’un travail et de meilleurs conditions de vie.
Prisés par les artistes venus du monde entier, dont la venue est rendue possible par le développement des voies ferrées et maritimes, ces lieux de divertissements témoignent également de l’ouverture de la ville à des nouvelles cultures, qui dépassent les frontières de l’Écosse. Cette ouverture, si elle semble à première vue bénéfique à l’épanouissement de la ville, a pour conséquence de creuser un peu plus le fossé qui sépare les différentes classes sociales et que la presse matérialise par la diffusion de scandales, comme par exemple celui des représentations dans les penny theatres du fameux French Cancan, que la bourgeoisie qualifie de danse obscène et décadente.
La menace d’une culture populaire pervertie, qui ébranle toujours un peu plus les normes sociales en vigueur au sein de la très prude société victorienne de Glasgow, force alors la municipalité à repenser, durant les deux dernières décennies du XIXe siècle, la nature et la forme des lieux de divertissements. Il s’agit par-là d’éduquer les classes populaires, et notamment la jeunesse populaire, au loisir intellectuel, au sein de lieux tels que des théâtres ou des opéras, dans lesquels des zones sont scrupuleusement choisies pour recevoir les spectateurs suivant leur classe. Ainsi, la communication que je vous propose aujourd’hui tend à montrer que le développement des lieux de divertissement à Glasgow, ainsi que l’évolution de leur forme témoignent de la fluctuation des frontières sociales et culturelles présentes.
Biographie
Fanette Pradon est actuellement doctorante à l’école doctorale LLSH de Grenoble, au sein du laboratoire ILCEA4. Son sujet de recherche porte sur la mise en place d’un système de contrôle social inédit appelé le Système de Glasgow, qui vise à interner de force des jeunes femmes dites déviantes dans des institutions totalitaires. Aussi elle aborde dans sa thèse la question des lieux de divertissement, surtout du point de vue de la déviance.
Avant de commencer ce doctorat, elle a passé un master LLCE à l’Université d’Angers et une licence LLCE à l’Université de Nîmes.